Si le très attendu troisième volet de Profils paysans, La Vie moderne, de Raymond Depardon sort cette semaine, Critikat choisit de mettre en avant un autre documentaire. À côté de Stéphane Mercurio, que nous avons rencontrée pour un entretien, rencontre la sordide actualité de prisons françaises au bord de l’explosion. Au décompte macabre des suicides (91 à ce jour pour la seule année en cours) s’ajoute la surpopulation carcérale (62843 détenus pour 50881 places au 1er septembre 2008) ou les incroyables carences du suivi médical, notamment psychiatrique. Il serait simpliste de faire uniquement porter le chapeau à la très contestée et contestable Rachida Dati. La situation résulte en effet d’une gabegie politique ancienne n’épargnant aucun bord politique, et à n’en point douter la faible rentabilité électorale de ce sujet est l’un des nœuds de cette question complexe. Toutefois la politique pénale inique et incohérente de l’actuelle Garde des Sceaux, particulièrement l’application des peines planchers systématiques, ont pour effet d’amplifier la pression au sein des prisons d’un pays régulièrement épinglé par les rapports de l’Observatoire Internationale des Prisons (OIP) ou condamné par la Cour Européenne des Droits de l’Homme. En se plaçant du côté d’innocents, des familles de détenus, Stéphane Mercurio fait résonner la prison de manière presque amplifiée. Cela grâce à un dispositif cinématographique original et intelligent, dans lequel intervient notamment la fixité de l’image photographique : un pas de côté pour mieux donner à penser la prison. Cette dernière est le point aveugle d’un film qui montre pourtant avec puissance l’indigne et honteuse réalité du dedans. Le cinéma documentaire n’a aucunement besoin des gros sabots de Michael Moore ou de Karl Zéro pour dénoncer, ou évoquer, efficacement, il a simplement besoin de bons cinéastes.