Un terroriste dangereusement basané se fait choper par le GIGN anglais après avoir assassiné à la bombe cent-vingt Londoniens dans un marché à ciel ouvert. Le procès à huis clos va avoir lieu alors que l’accusation refuse de soumettre tous les éléments de l’enquête à la défense, forçant ainsi les avocats principaux, Martin Rose et Claudia Simmons-Howe, à contre-enquêter et à découvrir, au péril de leur vie, l’imprudence meurtrière des autorités britanniques.
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Comme bon nombre de films faisant de l’attentat complotiste un contexte allant de soi et ne nécessitant aucun campement et aucune écriture filmique, Closed Circuit est un pur produit dérivé des séries américaines qui tentent d’amalgamer terrorisme, romance et paranoïa de la surveillance. L’écran démultiplié qui ouvre le film, à la manière d’un épisode de Person of Interest, annonce donc un brûlot anti-NSA locale teinté du souffre des grands complots -ceux qui dévoilent la culpabilité des gouvernements : que nenni, Closed Circuit, en faisant mine de déboulonner les puissants et l’implication de ces derniers dans les actes de terrorisme, ne s’intéresse qu’à de petits caractères. Il suffit pour s’en convaincre de détailler la médiocrité des personnages : Martin et Claudia, avocats de leur état, enquêtent mollement, sentent le complot, se transforment en espions de choc quelques minutes mais ont été amants. Voilà qui rend l’intrigue trois fois plus intéressante et permettra quelques scènes de frôlements absolument hors sujet ! De ces puissants agissant dans l’ombre et à la barbe de la justice tout droits sortis d’une une du Point, nous ne verrons rien, nous ne sentirons rien, nous ne comprendrons rien. La surveillance est un effet de manche, un motif à représenter bêtement (une caméra de surveillance, un petit micro, un traître et le tour est joué). Scénarisé par l’auteur des Promesses de l’ombre et de Dirty Pretty Things et réalisé par John Crowley (Boy A), Closed Circuit éprouve ses sujets post-11 septembre avec une légèreté qui confine à l’indifférence.
La superficialité du regard
De fait, Closed Circuit ne regarde rien : ni le déroulement de l’enquête qu’elle brouillonne en deux temps trois mouvements, ni celui d’un procès inéquitable, ni même les raisons de l’attentat lui-même. La légèreté du propos et de la manière n’est pas le fait d’un mal (la machine administrative et secrète) évacué en hors-champ : elle est la solution au problème de l’écriture. Il parut sans doute évident aux auteurs de ce gratin dauphinois sans crème de tromper la sécheresse de leur œuvre en l’inondant de clichés policiers (le suicide-meurtre, la journaliste trop curieuse, les services secrets fantasmés). C’est le projet même et l’absence d’engagement qui font de cet objet sans génie et sans saveur une surface plane, prête à accueillir l’expérience du spectateur, sa connaissance d’événements réels adjacents, choisissant le recyclage des figures télévisuelles (l’avocat-espion-enquêteur-justicier) et mettant en valeur l’enchaînement d’un récit qui mime la logique pour masquer son profond vide. L’ennui profond des acteurs comme des auteurs qui ont participé à Closed Circuit est palpable à chaque instant, et révèle la faiblesse des bricoleurs involontaires de l’image qui transforment la tragédie en anecdote, au lieu de faire l’inverse.