Énième film abordant le conflit nord-irlandais, Shadow Dancer sera vite oublié. Il n’étudie ni son ampleur historique et politique (Le vent se lève), ni un cas individuel extrême (Hunger) ; bref, à comparer avec les récentes percées – même controversées – du cinéma dans les Troubles, le film de James Marsh fait trois pas de mouche et s’éclipse. Prenant pour point de départ une tentative démasquée d’attentat à la bombe dans le métro londonien, il suit la coupable, Colette, qui doit maintenant devenir une informatrice pour survivre. Cette Irlandaise mère d’un enfant semble souvent moins attachée à sa lutte politique qu’embrigadée par défaut : elle y est née, elle y a vu le sang dès son plus jeune âge, et elle y est maintenant irrémédiablement liée – si elle part, elle meurt.
À force de manger à tous les râteliers, Shadow Dancer manipule maladroitement un trop grand nombre de références. Le conflit irlandais ? Il l’élude, ou du moins le fige dans une posture applicable à tous les cas d’oppression que la géopolitique propose. Le thriller politique ? Il n’a que le temps de le simplifier. Une histoire d’indics, de concurrence policière, une poignée d’assassinats, d’interrogatoires : la toile tissée par le scénario n’est pas suffisamment complexe ou originale pour développer un intérêt. Le drame familial ? Il est perceptible, mais là encore, trop sporadique. Que ce soit du côté des traumatismes d’enfance que le conflit a fait germer chez Colette, ou de celui du noyau de confiance aujourd’hui fissuré par la tension politique, le scénario n’ouvre que des pistes inabouties. Enfin, une amourette commence même de naître entre l’indic et l’inspecteur qui l’emploie.
Rien d’autre, donc, que des débuts d’idée dans ce film très oubliable. Il aurait été préférable que James Marsh choisisse pour de bon de quoi il souhaitait traiter. De son incertitude résulte un objet brouillon, tiraillé, désorienté, que même l’interprétation dolente de la charmante Andrea Riseborough ne rattrape aucunement.