Adapté du roman éponyme d’Éric Reinhardt, L’Amour et les forêts (beau titre) dépeint l’engrenage d’une relation amoureuse initialement idyllique qui se transforme en cauchemar domestique. La dualité du personnage de Grégoire (Melvil Poupaud), archétype du pervers narcissique, est d’abord figurée de manière astucieuse : ce n’est pas l’amant de Blanche (Virginie Efira) qui apparaît d’emblée comme double, mais son propre quotidien, de sa sœur jumelle aux éclairages bleus et rouges. C’est au début que le film convainc le plus, quand il révèle, par touches, le fond malade d’un monstre tristement banal et sans mystère ; le film n’entretient d’ailleurs aucun suspense, puisque le récit consiste en un long témoignage de Blanche, qui retrace sa descente aux enfers.
Il n’est pas tout à fait anodin que Valérie Donzelli s’accroche ensuite, alors qu’elle filme étape par étape la dérive du couple, à l’unique parenthèse qui vient illuminer le chemin de croix de Blanche : ce retour aux forêts et à la tendresse partagée d’un après-midi sans lendemain sert de bouée de sauvetage au film, pour l’empêcher de sombrer tout à fait dans un récit monocorde d’emprise et de résilience. Dommage que la récurrence de ces flashs substitue à l’étude, par la mise en scène, du parcours de l’héroïne – à l’exception du dénouement, qui dépeint sa reprise en main du cadre –, une série de vignettes stylistiques assez sommaires.