Il était légitime, à l’annonce de cette suite de SOS Fantômes (le premier est sorti il y a trente-sept ans), de s’interroger sur le public ciblé : s’agirait-il d’un film pour les fans originaux, ou serait-il plutôt destiné à une nouvelle génération dont les références sont sensiblement différentes, notamment nourries par le revival des années 1980 à l’œuvre aujourd’hui ? Jason Reitman (fils d’Ivan Reitman, réalisateur des deux premiers films) a vraisemblablement trouvé un compromis pour toucher le public le plus large. Abandonnant le ton comique des films originaux au profit d’une mise en scène de film d’horreur de série B, ce nouveau volet donne en effet, dès la première scène, la désagréable impression d’assister à une énième saison de Stranger Things. Outre la présence de Finn Wolfhard au casting, les similitudes entre le film et la série sont troublantes : mêmes enjeux scénaristiques (une bande d’enfants que personne n’écoute se retrouve à sauver le monde), mêmes tics esthétiques et utilisation de la lumière (lens flares, néons, stries lumineuses), et même narration dramatico-horrifique (ponctuée de jumpscares à tout-va) teintée de quelques touches d’humour. Ce prolongement de l’esthétique de la série à grand succès passe aussi par le déploiement d’une panoplie d’effets spéciaux peu cinégéniques (exemplairement, le vortex final au-dessus de la maison des personnages, qui ressemble sensiblement à celui du sixième épisode de la troisième saison de Stranger Things).
Horizon transmédiatique
Au delà de ce changement de ton, le réalisateur s’avère rapidement bien incapable d’inventer quoi que ce soit de nouveau, se contentant d’égrener les références au premier film le long de son récit : les personnages découvrent tour à tour la fameuse Cadillac poussiéreuse, les tenues et accessoires des ghostbusters, puis les clins d’œil s’enchaînent, à commencer par le Bibendum Chamallow jusqu’à la fameuse réplique « Who you gonna call ? ». Ce recyclage atteint son paroxysme lors du climax dramatique, où plusieurs plans du premier film sont recréés quasiment à l’identique : cette démarche marque assurément une volonté d’inscrire les films dans un univers qui les dépasserait et les engloberait, processus déjà initié avec la sortie du reboot féminin en 2016. Le film sacralise à un tel point les objets iconiques des premiers films qu’il prolonge moins l’histoire originale – comme le suggérait le titre – qu’il ne réactualise son culte, ne se faisant finalement qu’une pièce de plus dans l’univers transmédiatique de la franchise Ghostbusters – confirmant la crainte initiale d’un pur produit pour les fans.
SOS Fantômes : l’Héritage semble malgré tout questionner, par (trop rares) endroits, cet entremêlement des générations (celles des personnages du film, mais qui sont aussi celles du public) comme tiraillées entre deux époques (le personnage principal cherche des barres de réseau à peine arrivé dans cette nouvelle maison, puis lance un 45 tours dans le juke-box du drive-in de la ville). La mise en question de ce passé emblématique aurait pu constituer le cœur réflexif du film, mais il eût fallu que le réalisateur ait le courage de s’éloigner des sentiers battus pour que la chose présente un tant soit peu d’intérêt.