Le problème avec les comédies romantiques est que la sympathie qu’elles génèrent parfois ne masque que rarement le déroulement de clichés plus ou moins grotesques sur la vie de célibataire, les rencontres impossibles, les rêves d’adolescentes et une morale pugnace. C’est encore le cas du film de Nabil Ayouch qui déroule le tapis à une multiplication d’images d’Épinal de New York puis de l’Égypte. Si tout cela ne porte pas à conséquence et reste gentillet et sincère, on garde la désagréable impression de connaître tout le film dès son commencement.
Depuis quelques années, la romance fait la vie dure à l’originalité… les charmants Quand Harry rencontre Sally et Quatre mariages et un enterrement font des émules mais ne sont toujours pas vraiment dépassés. Whatever Lola Wants fait partie de cette longue série de films qui reprend un à un les caciques du genre : nous avons donc Lola, 25 ans, postière le jour et danseuse rêvant de Broadway la nuit. Jouvencelle, jolie, fraîche et forcément un peu gauche, elle déprime sur son canapé-lit avec son meilleur ami homo, Youssef, en regardant Les Chaussons rouges (dont ils récitent forcément les dialogues), et tombe amoureuse d’un riche Égyptien venu faire ses études en Amérique. Mais ce dernier repart au pays, laissant Lola seule (ou presque) avec ses rêves et son petit cœur d’oiseau tombé du nid. La belle, galvanisée par Youssef (forcément fantaisiste et fanatique de danse), prend l’avion pour Le Caire y trouver l’amour et la gloire.
Whatever Lola Wants brasse, comme de bien entendu, les clichés romantiques et sociaux. Mais on y trouve, ce qui fait presque partie du cliché, quelques passages de bienveillance académique : en Égypte, on croisera donc une ancienne star de la danse mise au ban de la société pour adultère (interprétée par la splendide Carmen Lebbos), un marchand de pommes qui ne demande que des sourires (il ne doit pas avoir besoin d’argent), et des enfants qui rient, des familles conservatrices… à New York, on a droit à quelques répliques rigolotes, dont une qui revient à Youssef : « C’est bien ma veine, quand on ne chasse plus les homos, c’est au tour des Arabes. » Le problème est que Nabil Ayouch semble persuadé que le voyage en Égypte fera oublier que son histoire est totalement attendue : malgré les milliers de kilomètres qui séparent ses personnages de Broadway, on reste tout de même dans un déroulement dramatique sans surprise et sans véritable rebondissement.
Mis à part le fait qu’une Américaine devenant star de la danse du ventre en Égypte semble peu vraisemblable, on regrette que la délocalisation de la comédie sentimentale n’ait pas davantage donné lieu à un renouvellement du genre : malgré quelques portraits intéressants, notamment dans la famille bourgeoise de l’amoureux de Lola en Égypte, famille partagée entre l’influence américaine de Friends et l’archaïsme familial du pays, comme toujours, l’ensemble n’est pas méprisable, mais terriblement anodin. Pas de quoi fouetter un chameau en somme.