C’est un profil de films que l’on retrouve souvent en fin de festival, parmi les concurrents à la Palme d’or : le petit film politique à sujet, qui compense son manque de finesse de mise en scène par un allant et une énergie contagieuse. Ce n’est pas insulter Haut et fort que de le ranger dans cette catégorie, puisqu’il embrasse consciemment cet horizon d’un cinéma à message. Anas, ex-rappeur, donne des cours d’écriture et d’interprétation dans un centre culturel de Sidi Moumen, un quartier de l’est de Casablanca, où le hip-hop est avant tout présenté comme une forme d’expression politique et un moyen de s’affranchir des normes d’une société patriarcale et religieuse. Constat en partie légitime mais qui, de concert avec le film, réduit l’art au rang de simple vaisseau d’un propos, et le reste (le débit des rappeurs en devenir, le phrasé, l’intonation) à une « attitude », rebelle et libre.
De ce canevas, le film tire un récit choral assez convenu, qui égraine des vignettes pour proposer une vue en coupe de la société marocaine. Ayouch suit de la sorte un parcours fléché (qui aboutit à un concert et à une fin lucide mais gorgée d’espoir), relevé par des scènes de groupe et une attention portée aux visages des jeunes interprètes. Film généreux mais peu consistant, dont on est en mal de trouver un seul plan qui se détache, à la fois pertinent politiquement et trop peu singulier pour qu’il reste en mémoire ; bref, un film qui donne des « nouvelles du monde » sans vraiment s’y ouvrir.