Dans le sud de la France, il existe un pentagone de la folie. Un pentagone tirant sur l’hexagone, avec des côtés irréguliers, avec aussi des zones sans la moindre trace de folie ; mais un pentagone de la folie malgré tout. Faits divers atroces, sombres histoires locales : Luc Moullet mène l’enquête. Avec une nonchalance narquoise vis-à-vis des magazines d’investigation sensationnaliste, Moullet nous offre un docu-polar d’enquête sans commune mesure avec La Main au collet d’Alfred Hitchcock, une « autre enquête locale », selon les mots de Moullet lors de sa présentation, sans commune mesure donc mais « uniquement parce qu’il n’a pas réussi à avoir Cary Grant ».
Nous voilà prévenus : Moullet déballe le grand jeu, la terreur est à nos portes, les fous sont lâchés, d’autant plus que l’épidémie de goitres radioactifs du nuage de Tchernobyl est là pour aggraver le dossier. Subrepticement, c’est aussi l’occasion pour Moullet de se moquer gentiment de ses contemporains, de dresser le portrait d’une humanité pittoresque qui, si elle n’est pas aussi folle que le film voudrait le laisser croire, n’est pas en reste pour légitimer quelques petits particularismes locaux insulaires et gentiment barbares. En préambule de sa présentation du film, Luc Moullet a tenu à remercier deux membres de son équipe, des « jeunes ». Aucune raison pour ses admirateurs de s’inquiéter, cela dit : loin de vouloir raccrocher, le réalisateur maintient fièrement le cap.