Vous en souvient-il du temps où être cinéphile était une profession de foi ? Où les tentacules bien pensants de Dame Censure cantonnaient certains films à l’exploitation confidentielle, et d’autres à l’exil pur et simple ? Où l’amateur français de cinéma devait pousser jusqu’à Bruxelles, Berlin, Londres, voire jusqu’aux États-Unis pour contempler ces films tant convoités ? C’est un temps aujourd’hui révolu, où un DVD importé, où même un simple « clic », fût-il illégal, donne accès au cinéma du monde entier…
Mais Cannes, village gaulois peuplé d’irréductibles Méditerranéens, résiste seul encore à l’envahisseur. Ai-je le bon pass pour rentrer ? Faut-il un ticket bleu ? Un ticket rouge ? Vais-je être sacqué si mes places ne sont pas utilisées ? Et si j’ai oublié mon nœud pap’ ? Et si les videurs n’aiment pas mes chaussures ? L’amour du cinéma, dans ce Cannes 2009 tout entier inféodé à la déesse de la Bureaucratie Procédurière, tient pour les malheureux qui ne sont pas multi-accrédités du sport de combat. De là à conclure que Cannes se soucie plus de show-off (au rabais, c’est la crise) avec parties et beautiful people il n’y a qu’un pas, que nous ne franchirons pas. Remercions plutôt Cannes d’avoir ressuscité pour nous les frissons délicieux de la loi de la jungle cinématographique…