Kitano fait partie des abonnés à la Mostra de Venise où il a entre autres reçu le Lion d’or en 1997 pour Hana-bi. Cette fois, il vient nous présenter l’histoire de Machisu qui se découvre une passion pour la peinture dès son plus jeune âge quand son père était collectionneur d’art. Après le suicide de ce dernier pour cause de faillite financière, nous le retrouverons au fil des âges et de ses tentatives à la recherche de la reconnaissance artistique.
Il y a le côté typiquement kitanesque de nous raconter l’histoire de ce petit garçon avec une certaine tendresse ironique, mais rien de nouveau sur ce front. Ce qui par contre est intéressant réside dans le regard sarcastiquement pince-sans-rire que le cinéaste porte sur la difficulté du métier et surtout sur la vanité des tendances et autres avant-gardes en tout genre. Nous voyons le pauvre Machisu – qui entre temps a pris les traits de Kitano – demander conseil à un galeriste qui le mènera en bateau toute sa vie en lui disant de changer de style car à chaque fois le sien est dépassé. Mais c’est au succès que cette motivation fait foi et non pas à la sincérité d’un style particulier. La dévotion pour son art flirte avec la recherche forcenée du succès et nous retrouvons un commentaire en filigrane fort véridique quant à la tyrannie du marché de l’art comme seul baromètre de la vie d’un artiste.Alors qu’il avait un trait personnel, il se laisse convaincre d’essayer le cubisme, puis ce sera au tour de l’abstraction, puis celui du pop art et ainsi de suite. Les copies de Picasso, de Cézanne, de Warhol se succèdent et Machisu n’a toujours pas trouvé le succès. C’est alors qu’il prend le chemin de l’art contemporain et là les rires se font de plus en plus hilares car tout est permis, du body art au jet de peinture façon Pollock. Rien ne marchera, mais lui continuera toujours d’y croire alors que tous ses anciens camarades artistes se sont suicidés ou ont perdu espoir. Finalement, Machisu apercevra, accroché au mur d’une galerie, un tableau volé qu’il avait peint quand il était petit, morale d’une fidélité à son propre art qui n’aurait pas dû lui faire défaut. Pas étonnant de la part d’un Kitano qui reste fidèle à son cinéma.