Cars prend sa ligne de départ le 14 juin et étourdira plus d’un aficionado des animations Disney. D’une facture impeccable, d’un visuel époustouflant, ce film repousse encore les limites de l’image de synthèse en quelques innovations techniques. Décors et voitures, le moindre détail est calculé, soupesé, disséqué, et ne laisse à l’œil que bien peu de repos. Contre-poids à un scénario léché jusqu’au bout du capot !
Premier long métrage à utiliser le tray tracing, technique qui permet aux voitures de refléter leur environnement de façon réaliste, et le ground-locking system (la voiture reste fermement sur la route, ce qui suppose une vraie assise animée), Cars de Lasseter travaille avec un égal plaisir le décor réaliste et la vision de ces voitures terriblement humaines et foncièrement d’acier. Celles-ci oscillent entre la dureté de leur carapace et la flexibilité de leurs expressions : les mouvements/bouche/yeux/roues sont ainsi en harmonie avec le métallique. Étonnamment, toutes ces voitures se mettent à exister, même si le travail sur rires-sourires-pleurs-froncements-de-sourcils joue sur la spécificité et la reconnaissance immédiate, à chaque voiture son caractère et pas un autre. Les matériaux et la matière, d’emblée, sont l’atout de Cars : routes sablonneuses, tarmac, capots, rouille, vitres, éclairs, poussière… La texture délicate, élaborée de plus en couleurs réalistes et chatoyantes, se couche sur l’implacabilité des décors : circuits automobiles (plus de 120 000 véhicules dans les gradins, 2000 sur la piste, séquences de foule jamais créées, mieux que les fourmis dans 1001 pattes), autoroutes, désert, petite ville de Radiator Springs (à différentes époques), forêts (mais les feuilles des arbres ne bougent pas, aucun vent dans le film), champs, et la mythique Route 66… L’éblouissement dans les mouvements donnés à la « caméra » avec des points de vue uniques lors des courses automobiles ou des formidables panoramiques pour que le spectateur voie en ensemble, l’ensemble de ce luxe, contrebalance le calme apparent des plans fixes sur les vedettes à quatre roues. Un alliage rythm’n’folk pour en mettre plein la vue, pardon, plein les phares. Dans cet univers où l’automobile est la norme, les nuages, les rochers (lieux de projections par excellence, l’anthropomorphisme à son paroxysme) et même les mouches sont à l’image de ces capots ronflants, joyeux, amoureux.
Mais enfin voici l’histoire : Flash McQueen, voiture de course superstar, doit affronter en Californie deux de ses plus rudes concurrents pour la prestigieuse Piston Cup. Par accident, il reste coincé dans un bled perdu sur la Route 66, à quelques pneus de l’autoroute, Radiator Springs. Comme l’adage le souligne : la route à faire est toujours plus importante que le but atteint et notre héros, qui ne pense qu’à ses boulons et ses roues de secours, découvre un monde fait d’amitié et d’amour et où les apparences sont « voiturement » trompeuses. Les personnages sont convenus (le camion dénommé Martin et qui a comme pare-choc des dents de lapin ressemble étrangement à l’âne dans Shrek), les effets de surprise attendus, les bons sentiments affectés, et les méchants toujours punis, et puis on se moque de que ce que l’on retrouve en nous… Bien sûr, le scénario n’existe que pour mettre en évidence les images, et les dialogues (« La prunelle de mes phares », « J’ai perdu mes boulons », « Pour l’amour de Christler, demandons notre chemin ! ») aux jeux de mots incessants (comme cette critique!) ne convainquent guère. Les parodies abondent qui lassent beaucoup et l’anthropomorphisme (à quand un film d’animation sur la rencontre entre un ordinateur et une clé USB?) finit par crisper. Mais enfin, du spectacle techniquement époustouflant qui amusera peut-être les enfants (les objets dérivés ne vont pas tarder à arriver) et étourdira certainement les adultes. Pour finir, en version française, Guillaume Canet (Flash McQueen) fait des phares à Cécile de France (Sally), admire le capot de Bernard-Pierre Donnadieu (Doc Hudson) et espère remporter la Piston Cup devant le pas très gentil mais pas mal roulé Samuel Le Bihan (Chick Hicks).