Lorsque les studios de Wallace & Gromit rejoignent ceux de Shrek, on peut se dire que le résultat sera bon, les deux étant coutumiers d’une production de qualité. À voir Souris City, il apparaît qu’on aurait tort d’attendre plus. Le film n’est qu’une inoffensive et décevante pochade familiale.
Un film d’animation en 3D, c’est avant tout un cahier des charges. Il faut des protagonistes animaux anthropomorphes (cela facilite une ironie gentillette sur le monde humain), des parodies de films récents (pour combler les trous du scénario), des bons sentiments (parce que la morale c’est important), des acteurs vocaux célèbres (parce que ça fait bien sur l’affiche), des créatures accessoires mais vouées à une grande popularité (pour compléter les gammes de produits dérivés dans les fast-food), et de l’action. Beaucoup, beaucoup d’action. En fait, il s’agit le plus souvent de copier un film de divertissement live, mais en changeant la physionomie des protagonistes. Et surtout, surtout, ne pas trop profiter de la liberté créatrice que peut offrir l’animation.
Souris City connaît bien son cahier des charges. Il le décline à merveille, et le divertissement est assuré à 100%. Il aurait juste été souhaitable que, du mariage entre DreamWorks et Aardman, la personnalité de ce dernier studio ressorte mieux. L’humour très pince-sans-rire des créateurs de Wallace & Gromit a disparu ici, au profit d’une série de gags scatologiques, que seule leur démesure sauve parfois (la menace qui plane sur le Londres des souris est, tout de même, un raz de marée provoqué dans les égouts par les hordes de footeux biérophiles qui se précipitent aux toilettes pendant la mi-temps d’un match de l’Angleterre…).
La patte graphique du studio Aardman sur les personnages disparaît bien vite. Malgré le fait que les réalisateurs aient veillé à ce que les personnages subissent les mêmes contraintes qu’en stop motion traditionnelle, la vacuité du transfert de la technique Aardman en animation informatique est rapidement évidente. Il ne reste qu’une explication plausible : Aardman, ça fait vendre. En dehors de cette fausse originalité, le film fonctionne efficacement sur le modèle des animations 3D produites à la chaîne (Gang de requins, Madagascar, L’Âge de glace…). Ni plus, ni moins.
Gentillet et drôle, mais sans réelle ampleur, Souris City fait regretter le bancal mais très original La Véritable Histoire du Petit Chaperon rouge, l’un des derniers films d’animation 3D à vraiment sortir des sentiers battus. Le studio Pixar annonce pour Juin 2007 la sortie de Ratatouille, et Souris City apparaît presque comme un projet bâclé, destiné à coiffer Pixar au poteau, sur un thème commun. La comparaison s’impose d’elle-même, et il y a fort à parier que Ratatouille soit mille fois plus intéressant.