Joe (Joaquin Phoenix) est un tueur à gages vivant seul avec sa mère. Alors qu’il est engagé par un homme politique pour sauver sa très jeune fille d’un réseau de prostitution pédophile, la situation déraille et le voilà traqué par les sbires d’un gouverneur au cœur de ce trafic sexuel. Pareil point de départ pourrait laisser entrevoir une série B resserrée. Il n’en est rien. Ceux qui se souviennent de l’épouvantable We Need to Talk About Kevin pourront admirer la cohérence de la cinéaste, qui s’attelle une nouvelle fois à un argument de film de genre multipliant les citations (Psychose, La Nuit du chasseur, A History of Violence) pour le vider de l’intérieur et faire défiler un ruban de plans chichiteux, floutés et troués de cuts violents.
C’est que l’intrigue, volontairement épurée, se couple en permanence avec des réminiscences de l’enfance difficile de Joe. Ces flashs traumatiques ont moins tant valeur de marqueur psychologique (les coutures sont tellement sommaires qu’on doute que Ramsay cherche à y insuffler une réelle profondeur) qu’ils ne témoignent d’une ambition arty prononcée. Car l’horreur viscérale autour de laquelle gravite le cinéma de Ramsay est systématiquement étouffée par un attirail formel qui fait cinéma et qui dans le même temps n’assume pas sa gratuité. Résultat : un film horrible, à la fois bête, bruyant, vide et en surrégime, où la plus élémentaire scène d’action s’avère parfaitement illisible.