[Compétition internationale]
L’île des Robinsons of Mantsinsaari, d’abord finnoise puis devenue Russe après 1944, a accueilli une trentaine de familles et bien davantage de bagnards en 1952. Il reste aujourd’hui deux occupants qui ne se parlent pas (plus ?) : un Biélorusse et un Finnois. On découvre le premier, Alexej, dans son intérieur : photos de Lénine, de femmes à poil et de Loukachenko, drapeaux biélorusses y sont disposés. Les deux sont des arpenteurs, l’un de la terre, l’autre de l’eau, de cette île où la nature reprend ses droits sur les vestiges des temps révolus. Sans que cela soit infamant, l’espace, les éléments et les animaux, un cheval et deux chiens, sont filmés avec la même valeur que les deux bougres. Déjà primé du Cinéma du Réel en 2002 pour le court-métrage Kola, Victor Asliuk sait y faire pour épouser le rythme de la nature, pour capter les lumières de l’aurore ou le bruissement d’un vent menaçant. La relation au monde du cinéaste n’est pas sans rappeler celle de Volker Koepp (Grand Prix l’an dernier pour Holunderblüte), la prise de parole en moins puisque l’on a affaire à des taiseux. On assiste à un dérèglement absurde du réel (un tracteur tiré par un cheval) dans cet environnement confiné où Chappi, le chien du Finnois, fait figure de trait d’union et de médiateur entre les deux trappeurs. Nul renseignement sur les cause de la discorde, mais le spectateur dispose d’un potentiel bien fourni pour se raconter l’histoire de ces deux-là.