Lors de la très belle rétrospective consacrée au cinéaste espagnol fantasque Adolfo Arrieta, nous avons pu voir un certain nombre de films dont trois courts-métrages qui ont retenu notre attention : Dry Martini, Kiki et Vacanza Permanente. Il s’agit de trois œuvres tournées à différentes périodes et qui montrent admirablement bien le style délicieusement absurde et surréaliste d’Arrietta ainsi que ses évolutions.
Dans Dry Martini, œuvre tournée en vidéo, le cinéaste réalise une belle mise en image d’un texte de Buñuel – l’une de ses grandes influences – sur les plaisirs de l’alcool. Arrietta arrive intelligemment à s’approprier les mots du maître, qui devient l’espace de quelques plans, le scénariste de ses envies et de ses plaisirs. Un art réjouissant de la fantaisie et de la jouissance.
Kiki, tiré d’un texte de Colette, souligne davantage l’influence du surréalisme sur Arrietta. Fondé sur des dialogues décalés et des séquences absurdes, le film développe un univers fantastique relevant du rêve éveillé. Comme souvent chez l’Espagnol, la musique et les sons jouent un rôle primordial : tout relève de la projection mentale, à la manière des sonorités qui suggèrent constamment le songe. À travers les plans et l’ambiance de ce film, on peut souligner que Jean Cocteau n’est pas très loin de l’univers fantasmé de l’Espagnol.
Vacanza Permanente, premier film d’Arrietta tourné en vidéo est, selon ses dires, le début d’une nouvelle période. Il s’agit d’une sorte de journal filmé, qui prend la forme d’un ensemble d’instantanés de vie. La caméra subjective capte les sensations et l’atmosphère ambiante, qui est également soulignée par un travail important sur la bande-son. Les thèmes et les figures restent les mêmes (les anges notamment) mais le style évolue grâce aux nouvelles possibilités qu’offre le numérique. Arrietta s’adapte et renouvelle intelligemment la belle étrangeté de son art au regard des évolutions du cinéma.