Vincente Minnelli recrée en studios une Écosse fantasmée pour ses vieilles connaissances que sont Cyd Charisse et Gene Kelly, pour une comédie musicale sur fond de monde merveilleux. Entre rêve éveillé et ennui soporifique, on hésite parfois.
Deux amis new-yorkais partis chasser dans les Highlands se perdent dans les forêts d’Écosse. Ils finissent par découvrir un étrange village, où la cohésion sociale semble idyllique. Les coutumes ancestrales sont toujours vivaces, les jeunes filles et les sentiments sont d’une pureté absolue. Et surtout, on y chante et on y danse en toutes occasions. Si les personnages sont égarés dans des contrées mystérieuses, le spectateur, lui, est en terrain plus que balisé. Nous sommes chez Minnelli, qui retrouve Cyd Charisse qu’il avait déjà fait jouer dans The Band Wagon (Tous en scène) l’année précédente, ainsi que Gene Kelly, qui dirige ici les numéros dansés. Les scènes musicales alternent entre le ballet gai et bigarré des gentils villageois, et les séquences intimistes, propices aux déclarations amoureuses. On sait que le tournage, initialement prévu en Écosse, dut finalement se dérouler totalement en studios, ce qui causa la mauvaise humeur de Gene Kelly, mais arrangea visiblement Minnelli. En effet, la fluidité de la caméra qui se colle aux personnages, pour s’en éloigner radicalement l’instant d’après, les rendant minuscules dans la lande de bruyère montre bien que le cinéaste peut se livrer à la débauche de mouvements d’appareil très élaborés qu’il affectionne.
De retour à New York, les deux jeunes gens se rendent compte du brouhaha inutile de la cité, de la vanité de la foule qu’ils fréquentent en comparaison des valeurs immuables de la petite société écossaise. Ce qui leur paraissait représenter le cœur bien réel de la vie devient cinglante superficialité, tandis que le charme désuet de l’artificialité assumée des décors de studio est réévaluée pour la pureté des sentiments qu’elle offre. Bien sûr, cette contrée merveilleuse qui n’existe sur aucune carte et qui ne s’éveille qu’une fois par siècle, c’est le pays du cinéma, comme en atteste les tout premiers plans du films, dans lesquels se succèdent des tableaux figés représentant un torrent, ou de personnages endormis qui, tout à coup s’éveillent et se mettent en mouvement, comme par enchantement. Malheureusement, l’intrigue est cousue de fil blanc, et les numéros, qui surviennent de façon souvent abrupte, sont longs et répétitifs. Il est difficile, donc, à moins d’être un inconditionnel du sourire de Gene Kelly, de tomber sous le charme.