Le nouveau documentaire de Raymond Depardon sur « ses » paysans fut projeté en compétition d’Un certain regard. Deux ans ont passés depuis Profils paysans et le cinéaste vient prendre des nouvelles des hommes et femmes qu’il a rencontrés lors de ses pérégrinations. Le documentariste parcourt la France du Nord au Sud, de janvier à décembre, cette France méconnue, celle des hameaux, des fermes et des lieux-dits, où survit dans des conditions souvent précaires une classe destinée à disparaître. Dans un style inimitable, Depardon raconte son amour pour ces petites gens, respecte leurs silences, souvent longs, leurs hésitations, leurs croyances. Il n’est pas là pour juger, et encore moins pour donner une leçon de sociologie. Peu volubiles, ses interlocuteurs ne dévoilent pas grand-chose de leur vie, mais partager un instant de leur quotidien suffit à Depardon, et au public qu’il vise (la majorité des Français), pour comprendre leurs souffrances et les marques d’une vie dure mais pour laquelle chacun d’entre eux s’est battu et continue de se battre. Les gros plans sur les visages ridés et durcis de ces hommes et femmes au sourire hésitant, parfois naïf, souvent distant, restent la marque de fabrique du film, celle qui fait de ces « petites » gens des héros d’une France oubliée, sans complaisance ni triste objectivité.