Le générique de Spiderhead a beau défiler sur le vol d’un hydravion, difficile de se dire que son réalisateur, Joseph Kosinski, est aussi le pilote du très réussi Top Gun : Maverick, toujours à l’affiche. À une poignée de détails près (la présence de Miles Teller au casting et le goût du rétro pour les années 1980 : playlist composée de tubes de l’époque, jeux d’arcade, etc.), rien de plus dissemblable en effet entre le retour céleste de Tom Cruise dans les salles et ce petit huis clos diffusé sur Netflix. Le film raconte les expériences qu’un génie de la pharmaceutique, Steve (Chris Hemsworth), mène dans un complexe pénitentiaire. Ses occupants, qui bénéficient de conditions de détention en apparence luxueuses et d’une semi-liberté de mouvement, servent de cobayes pour tester des molécules produisant une série d’effets physiques – volubilité, fous rires, peurs violentes ou encore douleurs intenses.
On devine rapidement où le film veut en venir : les deux scientifiques s’appellent Steve et Mark, les molécules se diffusent à l’aide d’un smartphone connecté à un appareil accroché aux dos des prisonniers, et l’ambiance « nouveau monde » (bienveillance de surface, horizontalité factice des rapports entre geôliers et prisonniers, établissement qui ressemble à une start-up comme les autres) cache mal la monstruosité d’une entreprise prête à tout pour faire des bénéfices. Le film se rêve sûrement en prequel 2.0 du Meilleur des mondes d’Aldous Huxley, en dessinant l’émergence d’une société fasciste insidieuse dont les acteurs sont esclaves de mirages opiacés, mais il accouche surtout d’une dystopie minuscule et assez anecdotique. Aussitôt vu, aussitôt oublié.