Le cinéma est un regard de lumière, comme celui de Dieu. Ceci explique peut-être l’aptitude de cet art des sens à aborder des sujets sensibles, comme celui de Des hommes et des dieux.
Sensible parce que politique. Le film raconte le terrorisme islamique dans la région de l’Atlas, sous le prisme de la communauté monastique catholique d’un petit village, où huit frères, rythment leurs journées au service des locaux et dans l’amour de Dieu.
Sensible parce que gracieux. Le film se bâtit autour d’une bataille de territoires visuels et sonores. L’intimité cloitrée du monastère s’accole au montage à l’attaque terroriste violente de l’extérieur. Plus tard, c’est aussi le bruit d’un hélicoptère qui vient couvrir les chants religieux des frères. En orchestrant cette guerre d’espaces, Xavier Beauvois pose néanmoins une distance de par sa mise en scène sobre et ascétique, tout en s’autorisant parfois, par le biais de la lumière signée Caroline Champetier, un symbolisme pictural.
Sensible parce qu’on ne force pas l’émotion. La longue exposition du quotidien du monastère introduit le film comme un documentaire, signe que l’histoire qui va nous être contée est tirée de faits réels. Jamais une musique extra-diégétique ne tire de larmes dans les moments de fortes tensions dramatiques : il n’y a qu’une seule scène musicale. Un magnifique moment de plénitude sur le Lac des cygnes.
La touche finale de cette belle composition cinématographique revient au tandem inattendu Lonsdale/Wilson, qui déploient chacun un jeu et une présence opposés, offrant au film un magnétisme exaltant et fragile… Comme des oiseaux sur des branches.