En appliquant les codes de la comédie romantique à la relation fusionnelle qui lie Sophia et son frère Karim, La Femme de mon frère suggère, dans ses scènes les plus intéressantes, une joyeuse dimension incestueuse que le film n’ose toutefois jamais prendre réellement en charge. À la place, Monia Chokri récite besogneusement la leçon apprise chez Xavier Dolan, dont les atours kitschs et vintages ne constituent pas l’unique point de référence. Alors que des cartons pastel ponctuent régulièrement les séquences, le tic du plan composé jusqu’à la caricature atteint des sommets dans cette scène où une dispute familiale se trouve captée en contre-plongée à travers la table en verre du dîner. L’acmé de violence qui catalyse l’opposition entre Sophia et Karim contient en elle-même toutes les marques d’une mise en scène à la fois trop visible et néanmoins brouillonne (montage saccadé, répétition de champs-contrechamps verticaux démonstratifs, cris et larmes, etc.). Surtout, alors que Sophia est présentée comme une brillante chercheuse se heurtant à une société injuste et conformiste, la dernière partie du film s’attache à la faire rentrer dans le rang et à accepter son sort, si bien que l’on ne sait jamais vraiment où la réalisatrice se situe, entre étude sociologique et volonté autobiographique (ce que suggère son apparition à l’écran à la fin du film). Ses personnages semblent souvent pris dans la même indécision : eux qui se veulent libres et corrosifs ne sont, en vérité, que de pâles incarnations d’archétypes rebattus.