Parmi les courts métrages présentés à la Quinzaine des réalisateurs cette année, un premier film déjà très assuré brillait : celui d’Ariane Labed, connue jusqu’à présent pour son travail d’actrice chez Athina Rachel Tsangari, Yórgos Lánthimos ou encore Philippe Grandrieux. Olla est le prénom d’une jeune femme (Romanna Lobach) dont le film relate le séjour dans une petite ville non identifiée. À la première phrase formulée par la voix synthétique de Google Translate, on comprend qu’Olla vient sans doute d’Europe de l’Est et qu’elle a fait la connaissance de Pierre, son hôte (Grégoire Tachnakian), via un site de rencontres. Celui-ci commence par lui suggérer gentiment qu’elle devra désormais se faire appeler Lola, prénom plus commun en France. On se doute alors que la relation ne part pas sur les meilleures bases, impression renforcée par des cadres souvent inattendus, distanciés et fixes, qui inspirent un léger sentiment de malaise. Pendant 28 minutes, nous suivrons Olla dans ses excursions au centre commercial voisin, ses interactions avec la mère infirme de Pierre et ses activités lors de longues après-midi solitaires.
Ariane Labed déploie ce récit sec et elliptique en évitant autant le systématisme formel que les lieux communs. Pierre se démarque de l’archétype du salaud : s’il semble avoir une idée un peu trop précise du rôle qu’Olla doit jouer dans sa maison, ses manières sont plutôt douces et amènes. Réciproquement, Olla n’a rien d’une vierge éplorée, mais se révèle au contraire pleine de liberté et d’inventivité dans ses tentatives d’enchanter un quotidien peu réjouissant. Si l’on peut voir en Olla un puissant manifeste féministe, Ariane Labed évite toute forme de victimisation et réalise au contraire un film véritablement jouissif, truffé de gags et de surprises. La conclusion s’impose : une cinéaste est née.