The Hurt Locker fait partie de ces films qui paradoxalement sont en passe de devenir le genre américain par excellence : un film sur la guerre en Irak. On se souvient de Dans la vallée d’Elah et de Redacted, présentés ici même en compétition l’année dernière. Selon l’expression fort juste d’un spectateur assis à côté pendant la projection, le film de Bigelow est : « Une sorte de Redacted, mais en plus propre ». En effet, il s’agit d’une série d’épisodes vécus par une troupe de soldats américains pendant leur mission en Irak.
Ceux-ci ont beau être des épisodes, aussi tragiques soient-ils, mais ils composent pas moins de 2h10 de film et cela revient franchement long. La mégalomanie « coppolesque » sied bien lorsqu’il s’agit de films scénaristiquement complexes : pourquoi alors ce besoin d’empiler bombe après tir des épisodes qui finissent par se ressembler, alors qu’ils auraient été assez autonomes pour être amputés ? Après cette question qui restera éternellement sans réponse, concédons quand même quelques raisons au public de différencier The Hurt Locker de Redacted pour aller voir le film. Si De Palma montrait des soldats immatures et abrutis par la barbarie qui bombardent tout ce qui bouge, Bigelow n’hésite pas à filmer aussi leurs moments de profonde détresse comme c’est le cas pour James, jeune sergent téméraire qui refuse de faire sauter un enfant irakien déjà ensanglanté. Le mérite réside également dans la volonté d’analyser les raisons animant ces soldats partis volontairement sur le front – c’est la réalité décrite par le reporter Mark Boal. Bien que d’autres soient plus prudents et effrayés, nous découvrons des jeunes hommes comme le James nommé ci-dessus, fiers de risquer leur peau pour leur pays et déterminés à recommencer une fois terminé leur mandat. Le format YouTube en moins, Bigelow poursuit la confession américaine entamée par De Palma ; vu la ferveur des applaudissements, ils semblerait bien que cela ravisse beaucoup d’âmes indulgentes.