Merzak Allouache est redescendu de ses Terrasses algéroises pour se poser à Mostaganem, notamment son bidonville où vit Omar, un jeune délinquant. Celui-ci vit de vols à l’arrachée, se drogue à coups de pilules de « Madame Courage » (surnom de la substance), fait le désespoir de sa mère qui voudrait le voir remplir son rôle d’ « homme de la maison ». Pour compliquer les choses, il tombe amoureux d’une de ses victimes, une jeune fille qu’il se met à guetter jusque sous sa fenêtre (au grand dam du frère de cette dernière), et décide d’aller chercher noise au proxénète local qui a tabassé sa sœur. Rythmée par les arrachages de colliers et les prises de pilules, l’errance d’Omar fournit matière à un film noir aux contours familiers, ceux d’un mauvais garçon dont des actes sortant de son ordinaire pourraient ressembler à une forme de rédemption.
Le résultat effectif, cependant, paraît singulièrement délité, étiré, sans que la dimension temps ajoute au film autre chose qu’une attente prolongée, voire pire : du surplace. La faute en revient à une mise en scène qui rencontre la même limite constatée dans Les Terrasses : faute d’un point de vue affirmé, elle se rabat sur des tics éprouvés dans des configurations similaires (tournages à petit budget dans la rue, dimension sociale) et reproduits de manière plus automatique qu’habitée. Ce qui se résume à surligner constamment l’attention portée aux personnages, avec une caméra qui colle à tous leurs déplacements telle une remorque, et qui fait mine de se concentrer sur son protagoniste en braquant longuement son visage en gros plan (il est vrai que le visage de l’interprète Adlane Djemil ne s’oublie pas facilement). Soit un film qui aimerait montrer à quel point il s’intéresse à un individu à la dérive, mais qui ne semble le faire que par défaut – sans tout à fait convaincre, donc. Seule une certaine amertume d’un retour à la réalité (à rebours de ce que les situations-types laissent espérer) émeut vraiment, les tics susmentionnés n’ayant pas prise sur elle. On pense à cette jeune fille qui, contrairement aux attentes du drame amoureux, ne se laissera pas franchement séduire par l’être déchu et choisira une relative sécurité en société – ce que la caméra respecte, en lâchant ses basques dès qu’elle rejoint ses copines. C’est maigre, mais le cinéphile doit bien manger…