En ce moment, le plus vieux festival de cinéma au monde, la Mostra de Venise, qui se déroule en pleine Biennale d’art contemporain, fête ses 70 ans. Si le dernier film d’animation du Japonais Hayao Miyazaki, The Wind Rises, mélodrame déchirant et traité déroutant de précision sur les caprices de l’air, n’était venu relever une compétition moribonde, on aurait presque l’impression que les sélectionneurs se sont acharnés à en écarter soigneusement toutes les œuvres les plus stimulantes. Pour l’heure, on flotte plutôt entre les pensums fumeux (Die Frau des Polizisten de Philip Gröning, Allemagne), le radicalisme répugnant (Miss Violence d’Alexandros Avranas, Grèce) – graves incuries du cinéma d’auteur européen –, ou les sous-produits hollywoodiens bradés pour l’occasion (Parkland de Peter Landesman) ; mais il ne faut pas perdre patience : la Mostra a l’habitude de lâcher ses œuvres les plus fulgurantes dans les plis de la compétition, et de prendre, avec parfois un seul film, un virage inattendu, un nouveau souffle. Ce furent, en leurs temps, Redacted de Brian De Palma ou Essential Killing de Jerzy Skolimowski, l’année dernière Spring Breakers d’Harmony Korine. Cette année, hormis le The Wind Rises susmentionné, il faut pour l’heure compter sur la qualité d’observation de la solitude par Kelly Reichardt (Night Moves, diversement reçu à l’aune de la qualité de son précédent La Dernière Piste, mais restant néanmoins remarquable) et, hors compétition, sur le talent d’Alfonso Cuarón pour travailler les sensations et le vertige dans la durée des images hollywoodiennes (Gravity). Autant dire – espérer, du moins – que tout est loin d’être joué !