Produit par Disney, cette adaptation cinématographique d’un célèbre roman de science-fiction d’Edgar Rice Burroughs semblait prometteuse. Elle souffre pourtant d’un problème de taille : Avatar de James Cameron a déjà emprunté les mêmes chemins.
Publié en 1917, le roman La Princesse de Mars d’Edgar Rice Burroughs (le premier de la trilogie à succès Le Cycle de Mars) est considéré comme une vraie source d’inspiration par de nombreux cinéastes passionnés de science-fiction tels que George Lucas et James Cameron. La structure d’Avatar semble, en effet, largement influencée par l’œuvre de l’écrivain : John Carter, ancien capitaine sudiste durant la guerre de Sécession, voit son double corporel mystérieusement projeté sur la planète Barsoom (Mars) où il se découvre des capacités physiques nouvelles. Il prend rapidement part à un conflit entre les Therns, Tars Tarkas et les troupes de la belle princesse Dejah Thoris, dont il tombe amoureux. Simple humain, il devient progressivement le héros d’une lutte sanglante pour la survie de la planète, de la même façon que Jake Sully secourant les Na’vis et Pandora. Pour mettre en images l’œuvre de Burroughs, les producteurs de Walt Disney ont choisi Andrew Stanton, le réalisateur du très bon Wall‑E, certainement pour ses compétences techniques et sa profonde envie de porter le projet au cinéma. Doté d’un budget faramineux, d’un cinéaste apparemment talentueux, d’une 3D Imax et d’un casting intéressant, John Carter avait tout pour devenir l’Avatar de Disney, ce qui transparaît avec insistance sur l’écran. Ce désir un peu fou et opportuniste s’avère pourtant le point faible du film : l’ombre de James Cameron se déploie majestueusement sur les défaillances du blockbuster, qui, bien qu’épique et parfois impressionnant, ne soutient pas la comparaison. On aurait aimé le juger objectivement, mais les ressemblances sont trop persistantes, à l’image de quelques séquences particulièrement similaires. La qualité technique, la mise en scène parfaite de l’espace, le sens du récit et les thématiques passionnantes de l’œuvre du génie canadien mettent à mal une production très imparfaite.
Le principal reproche que l’on peut faire à John Carter concerne sa réalisation : Andrew Stanton, qui commet ici son premier film « live », éprouve beaucoup de difficultés à insuffler du rythme et à valoriser les décors somptueux mis à sa disposition – parfois réduits au simple état de maquettes. L’espace et les effets visuels sont mal exploités, ce qui annule souvent le pouvoir d’énonciation du métrage. Le découpage des scènes d’actions demeure trop illisible, le tout étant rendu brouillon par une 3D qui montre ici ses limites : l’œil, dans un tel montage elliptique et foutraque, ne peut suivre convenablement l’enchaînement des plans ; la 3D ne fait que mettre en exergue les défauts d’un réalisateur peu aguerri aux prises réelles, ce qui prouve encore que cette technique, quelle que soit sa perfection – elle en est loin – ne peut en aucun cas tromper le spectateur en rendant spectaculaire une mise en scène ratée. L’argument marketing tombe à plat et desserre le projet. Le fond du film demeure tout autant problématique avec son ensemble de bons sentiments et de valeurs morales lourdingues estampillées Disney : présenté au départ comme un marginal, notre cher héros devient très vite un homme cherchant l’accomplissement par le biais du mariage avec sa belle princesse humanoïde ; il semble souhaiter davantage fonder un foyer que sauver la planète Mars – sa seule volonté d’y rester. En bon futur patriarche, il est accompagné du traditionnel chien, personnage essentiel de ce type de production, qui a pour originalité ici d’être un gros cabot extra-terrestre, fidèle à son maître et pour lequel on craint le pire dans de nombreuses séquences. Que les amis des bêtes soient rassurés, le chien hollywoodien est, comme toujours, très résistant. Bien qu’anecdotique, la présence inutile de cet animal est à l’image du film, qui cumule les maladresses et les passages caricaturaux typiques du Walt Disney movie, l’empêchant de se démarquer de la masse des blockbusters lambda, calibrés pour plaire au plus grand nombre.