Dorothy, le troisième film d’Agnès Merlet (Le Fils du requin, Artemisia) aura été la plus belle tranche de rire (involontaire) du Festival. La réalisatrice rejoint le club très select des réalisateurs français qui ont tenté une incursion dans le cinéma d’épouvante… et s’y sont cassé le nez (voir – ou pas – Promenons-nous dans les bois, Saint-Ange, Haute tension, À l’intérieur…). Le pitch, improbable à souhait, ne manque pourtant pas de sel : une psychiatre traumatisée par le décès de son petit garçon est envoyée sur une île au large de l’Irlande pour examiner le cas d’une jeune fille, dont les troubles de la personnalité sèment la panique au sein de sa petite communauté. Dès son arrivée, la psy est confrontée à une série d’événements étranges qui vont semer le doute dans son esprit cartésien : n’y aurait-il pas un peu de paranormal dans tout ça ?
Agnès Merlet convoque tout un tas d’influences, et pas des moindres : Les Innocents, Psychose, Rosemary’s Baby, The Wicker Man, L’Exorciste ou encore Les Autres sont des sources d’inspiration prestigieuses mais, hélas, la cinéaste ne semble pas trop quoi en faire, à part tenter d’en imiter maladroitement les effets sans se soucier de la cohérence de l’ensemble. Dorothy n’a donc ni queue ni tête, compilant avec une candeur qui confine au sublime tous les poncifs du cinéma d’horreur. Avec un peu de recul et d’autodérision, le film aurait pu être vraiment drôle mais Merlet prend tout cela très au sérieux, et c’est bien là le problème. Dans le rôle de la psy, la pauvre Carice van Houten (remarquable dans Black Book de Verhoeven) affiche une mine désolée de bout en bout, et on la comprend. La jeune Jenn Murray, « révélation » du film, fait de Dorothy une folle furieuse parfois vraiment flippante, mais le potentiel de son personnage n’est jamais exploité autrement que dans le seul but de faire sursauter le spectateur… On s’en lasse donc très vite. Le final, assorti d’un twist inévitable, donne un coup de grâce définitif à ce grotesque nanar qui va très probablement attirer dans les mailles de ses filets quelques spectateurs estivaux en mal de films pop-corn (le film sort le 6 août). Le réalisateur français qui saura se hisser à la hauteur d’un Carpenter, d’un Romero ou d’un Craven (première période) se fait donc toujours attendre…