Nouvelle livraison d’animation informatique des studios Disney, Volt a la lourde tâche de prendre la succession de Wall‑E, le dernier né de Pixar, à la réputation qu’on peut estimer la plus surévaluée de tous les films de la firme. Tâche relevée avec efficacité, surtout compte tenu de l’absence des magiciens de Pixar au générique. Cela étant, Volt reste un pur produit Disney : efficace, divertissant, mais douloureusement bien-pensant.
Volt (« Bolt » – ce qui signifie éclair – en V.O.) est un jeune chien, doué de pouvoirs surnaturels. Il n’a aucun mal à battre une voiture à la course, ou à balayer d’un aboiement destructeur la totalité de l’armée du maléfique Dr Calico (si), qui détient le père de sa jeune maîtresse Penny. Mais tout cela n’est qu’une conspiration : le succès du feuilleton dont le petit chien est le héros tient avant tout au fait qu’il croit sincèrement à ce qu’il fait – qu’il ne joue pas, mais vit réellement ses aventures. Lorsque, suite à un concours malheureux de circonstances, Volt se retrouve au dehors, loin du plateau de tournage où il a toujours été confiné à son insu, notre héros va avoir quelques difficultés à faire face au fait qu’ils n’a aucun pouvoir.
Volt, c’est un peu le croisement entre The Truman Show et les Indestructibles – les recettes qui ont fait le charme de ce dernier film étant d’ailleurs pleinement utilisées. Ton cartoonesque, univers visuel stylisé très proche du film de Brad Bird… Mais n’est pas Pixar qui veut. De prime abord, les personnages sont bien écrits, prometteurs : le super-chien qui ignore qu’il n’a aucun pouvoir, la chatte des rues qui s’est construit une mafia de pigeons basée sur le deal « tu me nourris / je ne te mange pas », le hamster hyperactif téléphage… Mais là où Pixar parvient toujours à insuffler une humanité étonnante à ses protagonistes, Disney retombe vite dans la caricature. Volt devra comprendre qu’il est bon d’être normal, et pas seulement d’être un super chien ; la chatte Mittens va avouer que tout ce qui la tente, c’est la vie normale d’un chat domestiqué ; quant à Rhino le hamster, son côté absurde laissera bien vite place à une exaltation des valeurs de la famille et de l’amitié…
C’est à se demander : les décideurs de chez Disney auraient-ils peur du second degré inhérent aux meilleurs films d’animation du style Pixar, se contentent-ils de reprendre les recettes à succès et de les appliquer à une idée originale (quoique) ? Il semble ici que cela soit bien le cas : prendre certaines idées des Indestructibles, rejouer le scénario de Truman Show, en empruntant un brin des Madagascar et autres Âges de glace (les pingouins de la première saga, ou l’écureuil de la seconde trouvent un écho assez savoureux dans les pigeons affranchis qui parsèment Volt). Mais tout cela, au service d’un récit linéaire sans surprise, pointant droit vers la conclusion attendue (la famille c’est ce qu’il y a de mieux au monde. Si.) – une certitude qui retire tout intérêt réel au film.
Comme une autre production disneyienne, Cars manque finalement de la touche d’entropie qui donne l’humanité aux meilleurs Pixar. Spectacle rythmé agréable, prévisiblement drôle, Volt, star malgré lui n’est pas grand-chose de plus. C’est beaucoup demander, certes, mais après les remarquables Indestructibles, Ratatouille ou Monde de Némo, on est certainement en droit de tant en vouloir. Ce Volt ne démérite pas, tant qu’on ne lui demande que le strict minimum du canon du genre. Finalement, la seule originalité réelle du film lui vient de sa promo française, qui réjouira les latinistes par sa finesse involontaire – ainsi, on peut y voir la chatte Mittens (qui ne rêve que de vivre la vie d’un chien) se voir qualifier d’ « un poil cynique ». Lorsqu’on sait que le « cynisme », étymologiquement, vient du latin signifiant « chien », le jeu de mot est savoureux. Dommage que, selon toutes probabilités, il soit involontaire.